Hays a publié son enquête annuelle sur les rémunérations. Cette étude sectorielle permet de connaître les différentes grilles de rémunérations pratiquées selon les secteurs ainsi qu’une analyse pour chacun d’eux précisant les métiers les plus recherchés et ceux en tension. Mikaël Paraud, responsable Grands Comptes pour les métiers de la construction nous livre ci-après son analyse.
OPQTECC : Votre étude fait apparaître des différences importantes de rémunération en économie de la construction selon le secteur (architecture, ingénierie, immobilier, …). Comment expliquez-vous ces différences ?
Traditionnellement les niveaux de rémunération sont plus élevés dans le secteur de l’immobilier que dans le celui de l’architecture et dans une moindre mesure, l’ingénierie. Cela ne tient pas tant d’une charge de travail plus importante que du niveau de responsabilités assumées. Même si les Maîtres d’Ouvrages embauchent des profils issus de l’économie de la construction, les professionnels sont rarement appelés ainsi au sein des organisations et occupent traditionnellement le poste de « Responsable études et conception ». Dès lors, les professionnels voient leurs prérogatives étendues à la coordination d’équipes pluridisciplinaires externes : agences d’architecture et des bureaux d’études. Si l’économie de projets est un point central, l’accent est également mis sur la recherche de variantes techniques et la capacité à challenger ces « sachants ». Ce ne sont pas nécessairement des profils seniors qui sont recrutés. Les jeunes diplômés peuvent tout à fait occuper ce type de fonction. Toutefois, au regard du contexte actuel, les promoteurs immobiliers recrutent peu, et quand ils le font, leur besoin porte principalement sur des profils expérimentés.
OPQTECC : Les évolutions de salaires connaissent-elles les mêmes différences ?
Il en va effectivement de même pour les évolutions de salaires, même s’il ne faut pas s’attendre à une hausse exponentielle de son niveau de rémunération en basculant des secteurs de l’entreprise générale ou encore de la Maîtrise d’oeuvre vers les métiers de l’immobilier. A fortiori, la crise majeure que traverse les promoteurs pourrait conduire à une plus grande homogénéité des salaires entre les différents secteurs.
OPQTECC : Nos qualifiés constatent bien souvent que les économistes, notamment juniors, entrent plus facilement dans un cabinet d’ingénierie ou chez un maître d’ouvrage, alors que les salaires proposés, même par les petits cabinets d’économie de la construction, sont plus attractifs. Comment expliquez-vous ce phénomène ?
Ce constat est tout à fait juste. De par leur pluridisciplinarité, les cabinets d’ingénierie offrent souvent des projets d’évolutions fonctionnelles et donc des perspectives professionnelles intéressantes à court ou moyen terme. Cela pèse dans la balance au moment de la prise de décisions des jeunes diplômés.
Les métiers de la Maîtrise d’ouvrage ont quant à eux un pouvoir d’attraction naturel pour les candidats avec la possibilité de se positionner en qualité de donneur d’ordres.
OPQTECC : Selon votre étude, le métier d’économiste de la construction est dans le top 3 des métiers en tension. Comment expliquez-vous ce contexte pénurique ? Est-ce le cas quel que soit le secteur ?
A l’instar de beaucoup de profession du domaine de l’acte de construire, le métier d’économiste de la construction est peu connu. Hormis les BTS EEC et quelques écoles telles que l’ECOTEC permettant d’acquérir un Bac+5, il n’existe que peu de formations supérieures initiales menant vers ces fonctions.
De même, les professionnels du « chiffrage » ; bien qu’il serait réducteur de cantonner les économistes de la construction à ce seul pan de leur activité, s’orientent plus aisément sur des postes de technicien(ne) ou ingénieur(e) études de prix en entreprise générale. Cela tient beaucoup en l’image de marque des majors et grands indépendants du BTP. Le poids de leur communication est nécessairement plus important qu’au sein des structures d’ingénierie ou des cabinets d’économie de la construction, traditionnellement de taille plus modeste. Il n’en reste pas moins que même les grands acteurs de la construction peinent à recruter sur les métiers de l’étude de prix : la faute à un secteur du BTP qui malgré ses efforts souffrent encore d’un déficit d’image.
OPQTECC : Quels sont aujourd’hui les profils les plus recherchés ? Quelles évolutions avez-vous constatées depuis votre étude sur ce premier semestre 2024 ?
Depuis plusieurs mois maintenant, les promoteurs immobiliers ont presque tous gelé leurs recrutements et donnent leur priorité aux profils expérimentés en cas de besoin. Les acteurs de la Maitrise d’oeuvre, les bureaux d’études, les cabinets d’économie de la construction et surtout les entrepreneurs du BTP sont quant à eux davantage en recherche de candidats « junior » (de sortie d’école jusqu’à 3 / 4 ans d’expérience professionnelle). Ainsi, le salaire fixe moyen dans le secteur de l’acte de construire est passé de 43 300 € bruts à 40 800 € en l’espace de 6 mois sous l’effet du rajeunissement des compétences recherchées. En ces temps incertains, la maîtrise de la masse salariale est un enjeu majeur des recruteurs de tous bords.
OPQTECC : Quelles sont aujourd’hui les compétences complémentaires les plus recherchées lors d’un recrutement ?
La nature des projets avec lesquels les candidats se sont familiarisés est un élément clé. Aussi, de solides connaissances des opérations en lien avec le génie civil industriel ou encore la réhabilitation sociale sont des atouts considérables au regard des besoins du marché. Avec des enjeux majeurs en matière de décarbonation et les règles fixées par la RE2020, les programmistes et les économistes de la construction, doivent maîtriser les outils d’évaluation de la performance environnementale des bâtiments. L’analyse du cycle de vie dans la démarche programmatique et l’intégration de matériaux biosourcés dans les projets de construction tout en respectant leur équilibre économique, sont devenus des impondérables.
Retrouvez l’étude de rémunération Hays sur les secteurs de la construction en cliquant ici
Contact : Mikaël Paraud – m.paraud@hays.fr – 01 42 99 16 71