La rénovation énergétique des bâtiments est un gisement d’économies très sous-exploité.
Ainsi, jusqu’à un quart du parc de logements français pourrait en l’espèce faire l’objet d’opérations d’économie d’énergie financièrement rentables. Pourtant, ces opérations ne sont pas réalisées, et ce malgré la mise en place de plusieurs dizaines de dispositifs d’aides et d’accompagnement sur les vingt dernières années. C’est sans doute à cause de cette profusion que, peu ou mal informés, les ménages français passent à côté de ces économies.
Lesquelles, en ces temps d’inflation sur les dépenses contraintes (au sens de non évitables soit 30 à 40% de leur budget annuel), pourraient pourtant leur redonner du pouvoir d’achat, au moins en diminuant leurs dépenses énergétiques.
Il est bien dommage de ne pas creuser le sillon de ces économies car, comme de nombreux acteurs le répètent depuis des années : le meilleur moyen d’économiser l’énergie reste de … ne pas la consommer.
Afin de se conformer aux objectifs de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), il s’agirait, selon le Haut Conseil pour le climat (note 1), de passer d’environ 70.000 rénovations globales effectuées annuellement (en moyenne sur la période 2012-2018), à 370.000 par an après 2022 et 700.000 par an à partir de 2030.
La rénovation globale du parc immobilier français peut entraîner des économies significatives. Par exemple, les travaux de rénovation énergétique, qu’il s’agisse de la rénovation du bâti des logements, du changement d’un système de chauffage, ou de travaux relatifs à l’eau chaude sanitaire, à la ventilation ou à la climatisation, ont entraîné une réduction de 8,1 TWh/an de la consommation énergétique, soit 2,5% de la consommation conventionnelle d’énergie finale du parc immobilier français.
Le logement représentait déjà 12 % des émissions nationales de gaz à effet de serre (GES) en 2017 et, ajouté au tertiaire, on a atteint 20% en 2020 (dernier chiffre publié). Pour limiter cet impact, Vincent AUSSILLOUX et Adam BAÏS, économistes de l’agence France Stratégie (note 2) rattachée à Matignon, ont proposé un dispositif qui « fasse connaître aux propriétaires l’opportunité de la rénovation de leur logement, et leur permette de la réaliser sans avance de frais ni endettement de leur part ». Sorte de guichet unique de la rénovation, il permettrait d’optimiser les moyens mis à disposition par l’État pour la rénovation dans le cadre du plan France Relance.
Cependant, il est important de noter que la réalisation de ces économies nécessite un investissement initial important et une planification soigneuse. Pour que cet effort se traduise par une accélération du rythme des rénovations conforme aux objectifs du gouvernement, cette note éditée à l’automne 2020 (note 3) propose un dispositif innovant qui informerait les ménages de la rentabilité de la rénovation de leur logement, et leur permettrait de la réaliser sans avance de frais ni endettement, en contrepartie d’une rétrocession de 75% de l’économie réalisée sur leur facture d’énergie.
Quel est le principe proposé ?
Les auteurs de la note précitée qualifient cette procédure de « gagnant-gagnant » sur le principe suivant :
Où en est cette proposition innovante ?
Malheureusement sans doute au vu de l’endettement record résultant des dépenses du « quoi qu’il en coûte » liées à la crise sanitaire du COVID 19, cet astucieux autant qu’ambitieux dispositif n’a pas été retenu par les services du Premier ministre d’alors, Jean CASTEX, dont dépend l’agence France Stratégie.
Toutefois, de nombreuses aides publiques, dont MaPrimeRénov’, mise en place en 2020 et étendue par le plan France Relance, visent à améliorer la faisabilité et la rentabilité de la rénovation énergétique pour les ménages, afin de déclencher le passage à l’acte et se rapprocher ainsi des objectifs de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC).
Qu’est-ce que le dispositif France Rénov’ ?
Créée par la loi Climat et Résilience (note 4), c’est le nom du service public qui accompagne, depuis le 1er janvier 2022, les Français sur le chemin de la rénovation énergétique de leur résidence (note 5). Pour fluidifier les parcours de rénovation et leur donner plus de force, la nouvelle marque unifie des réseaux qui ont déjà fait leurs preuves : celui de FAIRE et celui de l’Agence Nationale de l’Habitat (ANAH).
Quelles aides pour rénover le parc tertiaire ?
Avant de parler d’aides, rappelons les contraintes.
Sachez que le gouvernement entend accélérer la transition énergétique dudit parc. Tel est l’objectif du décret Éco Énergie Tertiaire qui impose aux acteurs de l’immobilier tertiaire une réduction drastique des consommations énergétiques dans leurs bâtiments de plus de 1.000 m2.
L’ampleur du challenge est de taille : une réduction d’au moins 40% de maintenant à 2030, puis de 50% en 2040 et de 60% en 2050, par rapport à la consommation d’une année de référence.
Ainsi à partir du 1er janvier 2022, les assujettis doivent déclarer leurs données bâtimentaires et leurs consommations d’énergie sur la plateforme Operat (Observatoire de la performance énergétique de la rénovation et des actions du tertiaire) de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME – note 6). Pour l’année 2022, l’échéance de renseignement de ces données était fixée à la fin du mois dernier, soit le 30 septembre 2023. L’année 2022 constitue donc une année d’apprentissage d’Éco Énergie Tertiaire.
Venons-en aux aides accessibles aux propriétaires de parcs tertiaires. En sus des « prêts verts » bénéficiant de taux bonifiés (note 7), le dispositif des Certificats d’Économies d’Énergie (CEE – note 8) est un moyen majeur pour financer les travaux de rénovation de leur parc immobilier. Il peut être utile de vous faire accompagner dans le montage des aides du plan France Relance. En ce sens, le Réseau Bâtiment Durable, animé par l’ADEME et le Plan Bâtiment Durable, regroupe 25 centres de ressources et clusters régionaux et nationaux qui agissent au quotidien en faveur de la qualité du cadre de vie en agissant sur la performance environnementale, énergétique et sanitaire du bâti.
Les membres du réseau ont pour mission d’informer, soutenir et faire dialoguer les acteurs locaux de la construction, de l’immobilier, de l’urbanisme et de l’aménagement. Au quotidien, ils accompagnement les professionnels sur les sujets liés au bâtiment durable en facilitant la diffusion d’information, les retours d’expériences et les partages des bonnes pratiques. N’hésitez pas à contacter la structure la plus proche de votre organisation ou entreprise (note 9).
Quels sont les compétences et savoir-faire indispensables en ingénierie de la rénovation immobilière ?
En essayant d’être concis et précis, on peut retenir que les compétences indispensables en ingénierie que doivent maitriser les acteurs de la rénovation immobilière sont les suivantes :
- Compétences techniques : ils doivent avoir une compréhension approfondie des principes et des pratiques de construction ainsi que des outils de diagnostic et d’évaluation de l’existant. Ils doivent être familiarisés avec les différents types de matériaux et d’équipements utilisés dans la rénovation, ainsi que les normes et réglementations applicables.
- Compétences en conception : ils doivent être capables de concevoir des projets de rénovation qui répondent aux exigences du Client et aux codes, réglementations et normes de sécurité applicables. Ils doivent être capables de créer des plans et des spécifications techniques détaillés pour des solutions innovantes, performantes et durables.
- Compétences en gestion de projet : ils doivent être capables de gérer des projets complexes et de collaborer avec une grande variété d’intervenants. Par ailleurs, ils doivent être capables de respecter les délais et les budgets.
- Compétences en communication : ils doivent être capables de communiquer efficacement avec leur Client et les autres intervenants tels que le maître d’œuvre (si c’est le cas), les entreprises, les fournisseurs, les administrations, etc. Ils doivent être capables de présenter des informations techniques de manière claire et concise à leur Client et d’être constamment force de proposition.
- Compétences en exploitation : ces professionnels doivent aussi être capables de proposer les solutions d’organisation et de projeter les coûts d’exploitation-maintenance, opérations de GER (note 10) y comprises, sur de longues périodes. Leurs préconisations en cette matière peuvent impacter significativement les choix du Client en phase de conception et de construction.
En sus de ces compétences, il convient de noter que quelques savoir-faire spécifiques peuvent leur être utiles en matière de rénovation immobilière :
- Capacité à maitriser la méthode d’évaluation du coût global.
- Capacité à utiliser des logiciels de conception et de modélisation (maquette BIM) applicables à la rénovation.
- Compétences en leadership et en gestion d’équipe si le rôle d’OPC (note 11) leur échoit. Celui-ci comprenant le suivi et le pilotage des différentes phases de la rénovation, depuis l’étude de faisabilité jusqu’à la réception des travaux.
- Capacité à travailler en qualité totale.
- etc…
Les acteurs en rénovation immobilière peuvent travailler dans une variété de contextes, notamment des cabinets d’ingénierie, des entreprises de construction ou des agences publiques. Ils peuvent être responsables de la conception, de la supervision ou de la gestion de projets de rénovation de tous types, allant de la réhabilitation d’un patrimoine résidentiel à la rénovation urbaine.
Comment devenir expert en rénovation immobilière ?
Si on ne peut ou veut pas attendre de profiter du processus de VAE (note 12), il est généralement nécessaire d’obtenir un diplôme d’ingénieur en génie civil ou en génie mécanique.
Il est également possible d’obtenir une certification en rénovation immobilière.
Les certifications en rénovation immobilière sont des programmes de formation et d’évaluation qui attestent des compétences et des connaissances d’un professionnel de la rénovation immobilière. Elles sont utiles pour les personnes qui souhaitent se lancer dans une carrière à fort potentiel pour encore une très longue période ou qui souhaitent améliorer leurs compétences dans ce domaine pour augmenter leur employabilité dès aujourd’hui.
Il existe de nombreuses certifications en rénovation immobilière disponibles, chacune avec ses propres exigences et avantages. Certaines certifications sont axées sur des domaines spécifiques de la rénovation, tels que la rénovation énergétique ou la rénovation durable. D’autres certifications sont plus générales et couvrent un large éventail de compétences et de connaissances.
Voici quelques exemples de certifications en rénovation immobilière :
Un organisme comme l’OPQTECC est légitime à initier et mener des actions qui développent ces compétences et ces savoir-faire en :
- mettant en œuvre une offre de formation en rénovation énergétique et durable,
- délivrant des certificats RGE Etudes (note 13) ;
- accompagnant les professionnels du bâtiment dans leur transition vers la rénovation énergétique et durable ;
- sensibilisant les maîtres d’ouvrage et les maîtres d’œuvre, tant publics que privés.
Un économiste de la construction certifié RGE Etudes est un professionnel qui réalise des études techniques et financières pour des projets de rénovation énergétique. Il intervient à toutes les phases du projet, de la conception à la réalisation, en passant par le choix des matériaux, des équipements et des entreprises.
Il conseille son Client, le maître d’ouvrage, sur les solutions les plus adaptées à ses besoins, à son budget et aux réglementations en vigueur. Il établit des plans, des demandes de devis, des cahiers des charges et des dossiers de subventions. Il assure le suivi et le contrôle de la qualité des travaux jusqu’à la livraison de l’ouvrage et peut développer ses expertises en accompagnant le Client dans la mise en place de son exploitation.
Il contribue ainsi à améliorer la performance énergétique globale des bâtiments et à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES).
De la même manière, l’organisme de formation de l’Union nationale des Economistes de la construction, UNTEC Services, délivre des formations nombreuses dont le catalogue est remis à jour de manière continue (note 14).
Conclusion
La rénovation énergétique des bâtiments est autant une exigence qu’un défi.
La lutte contre le dérèglement climatique nécessite que notre modèle de développement soit plus sobre en énergies, notamment fossiles. L’objectif de la neutralité carbone en 2050 nécessite de redoubler d’effort pour réduire la consommation d’énergie et développer les énergies renouvelables, dans tous les secteurs : bâtiment, transports, activités productives agricoles, industrielles ou tertiaires, etc.
L’amélioration des performances énergétiques du parc français des bâtiments, tant des logements que des immeubles tertiaires, passe par :
Seule une approche combinée de ces quatre axes permettra d’atteindre les objectifs ambitieux que la France s’est fixé avec la SNBC (note 15). Au niveau national, rappelez-vous que le secteur du bâtiment représente près de 45 % de la consommation d’énergie finale et 27 % des émissions de gaz à effet de serre (GES).
- Note 1 : strategie.gouv.fr
- Note 2 : Note sur la rénovation énergétique des logements_Octobre 2020
- Note 3 : Haut Conseil pour le Climat
- Note 4 : Loi climat & résilience_Août 2021
- Note 5 : France Rénov’
- Note 6 : operat.ademe
- Note 7 : prêt vert bonifié_BPI France
- Note 8 : Fiche technique CEE
- Note 9 : Plaquette réseau Bâtiment Durable
- Note 10 : GER pour gros entretien renouvellement (GER) ou ensemble des opérations qui consistent à remplacer ou à rénover les éléments d’un bien immobilier qui arrivent en fin de vie ou qui sont dégradés.
- Note 11 : OPC pour ordonnancement, pilotage et coordination.
- Note 12 : VAE pour valorisation des acquis de l’expérience.
- Note 13 : Certifications RGE Études OPQTECC : E1 « Management d’opérations RGE » et E3 « Économiste de la construction » > certifications OPQTECC
- Note 14 : untec.com
- Note 15 : SNBC pour stratégie nationale bas carbone